Astrolabe par Muhammad ibn Ahmad al-Battûtî, signé et daté 1139 de l’hégire (1726-27)

Laiton coulé et martelé, gravé et rehaussé de clous en argent

Magreb, daté 1726-27

Haut. : 24,2 cm. Diam. : 21,9 cm. Ep. : 0,65 cm

Provenance :
Collection J.R., Alger, octobre 1888

Bibliographie :
Laure Soustiel, Astrolabe inédit, par Muhammad ibn Ahmad al-Battûtî, Publication Laure Soustiel et Pierre-Guilhem Métayer, Aix-en-Provence, juin 2009.

Maddison et Brieux (Ed. Bruno Halff), Répertoire des astrolabistes, Editions CNRS, 2009 (en cours de publication)

Astrolabe planisphérique en laiton, contenant quatre tympans servant les latitudes de:

1a – 21°40’ La Mecque
1b – 25°30’ Médine (“la ville du Prophète, que Dieu Le bénisse et Le protège”)
2a – 28° Drâa
3a – 30° Le Caire, Sijilmassa
3b – 33° Jérusalem, Marrakech
4a – 34° “Miknasat al-Zaytûn”, c’est-à-dire Meknès
4b – 36°37’ Tunis
2b – 41° Istanbul

L’araignée est typique de celles utilisées sur les astrolabes maghrébins pour 7 + 7 + 6 +7 étoiles à l’intérieur des quatre quarts de cercle, à partir de l’équinoxe de printemps (ou point vernal) vers la gauche dans le sens contraire des aiguilles d’une montre, ce qui correspond à la sélection magrébine standard de 27 étoiles.

La mère a un trône (kursi) bas, dans un style distinctement maghrébin. Le limbe de la mère est divisé en intervalles de 5° en 5° jusqu’à 360°, subdivisé pour chaque 1°. Le fond de la mère uni est dénué de tracés, à part une inscription européenne et de nombreuses marques de grattage.

Le facteur d’astrolabes est nommé dans une inscription au dos de la mère « Le fabricant [de cet astrolabe] est Muhammad ibn Ahmad ibn Lahsan al-Battûtî. Que Dieu lui apporte du succès. Amen. Année 1139 [de l’hégire] ». Mohammad al-Battûtî est connu par au moins dix autres astrolabes et un quart de cercle. La date est écrite sous la forme maghribî des « chiffres arabes » et la forme du 1 est celle du chiffre romain I.

Une inscription arabe plus tardive a été rajoutée dans l’espace préalablement vide autour du périmètre inférieur du dos de la mère. La gravure n’est pas de grande qualité et des parties du texte sont difficiles à lire :

« Ceci a été affecté à des usages pieux par al-Mu’azzam Muhammad, chef de la cavalerie, pour la très grande mosquée (située) à Alger – que Dieu la protège! – Ne laissez personne le sortir de la mosquée mentionnée (à moins que ce soit pour que) les muwaqqits (c’est-à-dire les astronomes de la mosquée responsables pour la détermination et la régulation des heures de prière) puissent l’examiner (et l’utiliser). (la donation fut établie) à la date de la dernière décade de rajab de l’année 1158 / 1745 »

L’inscription nous informe que l’astrolabe avait un rapport avec la Grande Mosquée (al-jâmi’ al-a’zam) d’Alger protégée par Dieu (al-jazâ’ir al-mahmiyya). A la fin de l’inscription, ceux qui sont responsables pour la régulation des heures de prière (al-muwaqqitîn) sont mentionnés, ainsi que le mois de rajab 1158 (septembre 1745). Il est possible que cet astrolabe était utilisé par les muwaqqits de la Grande Mosquée d’Alger à laquelle il appartenait, de façon à les aider à réguler les cinq prières quotidiennes. Ils avaient aussi accès à diverses sortes de tables astronomiques, dont certaines qui étaient faites spécifiquement pour la latitude d’Alger ont survécu. Les astronomes pouvaient utiliser le tympan pour Tunis, puisque les astronomes médiévaux utilisaient la même latitude pour Tunis et Alger.

Il y a une alidade à deux viseurs, fixée par un pivot et la clavette appelée cheval.

Cet astrolabe offre plusieurs intérêts : outre le fait qu’il soit signé et daté (1139 H/1726-27), il possède une inscription historique datée 1158H./1745 qui l’associe à la Grande Mosquée d’Alger. De plus, il est de grande taille, en excellent état, pourvu de quatre tympans et l’araignée a conservé ses clous d’argent.